Etablir un Top 10 est un exercice qui peut s'avérer intéressant mais qui a l'inconvénient d'éluder de nombreux facteurs. Il est effet très difficile d'y mélanger des vins aux styles très différents, qui ne s'adressent pas tous au même public. Très difficile également de comparer la production d'un artisan qui ne fait que quelques milliers de bouteilles avec d'autres qui en produisent plusieurs centaines de milliers.
Si on voulait établir ce top 10 sur la base de dégustations, on aurait autant de résultats que de dégustateurs ce qui ne présente pas un grand intérêt, raison pour laquelle je ne vous livrerai d'ailleurs pas ma version de la chose. Et Il faudrait le faire sur un échantillon de dégustateurs très important pour avoir une idée fiable.
Je vous propose plutôt un top 10 correspondant à un palmarès des ventes. Même si ce n'est pas parfait (notamment parce que je n'obtiens pas assez de vins chez certains vignerons pour répondre à la demande), cela est une photo de ce qu'aiment et consomment les amateurs français aujourd'hui dans le Beaujolais. C'est intéressant pour moi bien sûr en premier lieu mais je crois que ça l'est également pour vous donc je vous en fais part.
Top 10 établi en fonction du nombre de bouteilles vendues sur les 12 derniers mois :
1 - Jean Foillard
2 - Jean-Marc Burgaud
3 - Château Thivin
4 - Alain Coudert (Clos de la Roilette)
5 - Daniel Bouland (qui serait 1er si j'avais plus de vins à vendre...)
6 - Domaine L-C. Desvignes
7 - Domaine Jules Desjourneys
8 - Domaine Paul Janin & Fils
9 - Nicolas Chemarin
10 - Richard Rottiers
On notera qu'à part Jean Foillard, les vins nature sont absents du classement. Jean Foillard a vraiment supplanté tous les autres vignerons de cette sensibilité et en particulier le domaine du regretté Marcel Lapierre qui était le précurseur et l'étendard de cette vague des vins nature. A noter qu'Yvon Métras produit trop peu de vins pour être présent dans ce classement, mais c'est toutefois un domaine culte pour une partie des amateurs, comme le montrent les résultats récents de ventes aux enchères où les prix ont explosé.
Deuxième constat, 7 domaines sur les 10 ont une existence et surtout une réputation supérieure à 10 ans. Leur présence dans les guides, sur les fora et le bouche et à oreille en ont fait des indispensables, en raison de la qualité et de la grande régularité de leur production.
3 jeunes domaines sont toutefois présents, et le fait qu'ils soient là malgré un déficit d'image par rapport à leurs pairs interpelle. Concernant le domaine Jules Desjourneys, celui-ci joue dans le registre très haut de gamme, avec des moyens mis en œuvre sans précédent dans la région, et gage de produire de très grands vins d'esthète. Compte-tenu du prix des bouteilles et de l'âge du domaine (premier millésime 2007), on peut penser que le pari est déjà réussi car vendre des Fleurie et des Moulin-à-Vent plus de 40 euros était un défi immense.
Richard Rottiers et Nicolas Chemarin montrent quant à eux que la valeur n'attend pas toujours le nombre des années. Malgré des moyens limités et des terroirs moins réputés, ils font honneur à cette jeunesse beaujolaise ambitieuse et tellement dynamique. Un grand espoir pour l'avenir car il y a potentiellement des dizaines de domaines qui peuvent prétendre au même succès dans les années à venir.
L'émulation est sans doute à son paroxysme actuellement dans la région, avec également la venue de nombreux investisseurs et vignerons extérieurs (notamment bourguignons). Les choses vont donc encore bouger et je ne doute pas que ce classement change dans les années à venir, même si la fidélité des amateurs pour leurs domaines fétiches atténue forcément la reconnaissance des évolutions qualitatives.
Rendez-vous l'an prochain pour un nouveau Top 10.