Le domaine de Fa a été créé par la famille Graillot. Proches du Beaujolais qu'ils apprécient depuis longtemps, et propriétaires d'une maison familiale au nord de Mâcon, ce sont l'envie et la passion qui les ont guidés plus que l'intérêt économique qui n'est d'ailleurs pas franchement garanti à ce stade !
Assez discrets pour l'instant sur le travail qu'ils y mènent, j'ai voulu aller voir sur place pour avoir plus d'informations et me faire une opinion. Rendez-vous est pris au domaine en ce 26 Mai, à Boyer (71), à une trentaine de kilomètres au nord des vignes. C'est Sylvain Martel qui me reçoit. Ce jeune homme très dynamique, a travaillé pour la famille Graillot en Crozes-Hermitage et est désormais le chef de culture du domaine de Fa.
L'ancienne bâtisse a été réhabilitée, avec l'installation du cuvage dans la grange et le chai d'élevage derrière dans l'ancienne étable. Le bâtiment est semi-enterré à l'arrière et ces murs épais en pierre assurent une bonne inertie thermique.
Puisque nous sommes au cuvage, nous engageons la conversation sur les vinifications. Sylvain me parle de celle des 2015 :
Les raisins transportés en caissettes dans un camion frigorifique sont déchargées sur le côté du bâtiment, une rampe et un accès « à l'étage » permettant d'être au-dessus des cuves. Les raisins passent sur une table de tri avant d'être encuvés en vendange entière. Celle-ci a été légèrement sulfitée et foulée (fouloir acheté en 2015) ; après 3 jours de macération préfermentaire à froid, les fermentations se sont déroulées assez vite, les cuves étant légèrement chauffées sur la fin (à 26°C) pour qu'elles ne languissent pas. La cuvaison a duré en moyenne 12 jours avec un petit remontage chaque matin.
Les jus sont ensuite élevés dans différents contenants, principalement en bois comme on le voit sur la photo suivante avec des foudres et des demi-muids (il y aussi quelques barriques) :
Les foudres Stockinger sont arrivés après avoir passé une année en Crozes-Hermitage. Il y a également 2 cuves inox, quelques demi-muids et quelques fûts pour ajuster les volumes. Les 2015 y seront logés jusqu'en Septembre 2016 (Mise en bouteille prévue avant les vendanges).
Je note que le volume de Fleurie semble le plus important, et Sylvain m'indique que les rendements sont très différents (42 hl/ha en Fleurie contre 20 sur le Mont Besset). Les vieilles vignes du Mont Besset ont visiblement souffert du passage au bio. Parce que je ne vous l'ai pas encore dit mais la culture est bio dès 2014 sur tout le domaine (certification en cours car il faut 3 ans de conversion). Le rendement était déjà très faible au Mont Besset en 2014 avec 18 hl/ha, ce qui explique le choix du domaine de ne produire qu'une seule cuvée sur ce premier millésime, classé obligatoirement en Beaujolais.
Nous goûtons quelques échantillons de 2015, qui sera cette fois décliné dans les 3 AOC :
Tout cela sera à revoir après les mises, les assemblages et le temps feront leur œuvre !
Ensuite, direction le vignoble et en particulier le Mont Besset. Le domaine y a repris en 2014 5,5 ha de vignes situées à l'Ouest de l'appellation Saint-Amour ; il n'y a qu'une seule parcelle mais elle est à cheval sur 3 appellations : 2,5 ha en Beaujolais, 2,5 ha en Beaujolais-Villages et 0,5 ha en Saint-Amour. Ce sont les vignes tout en haut, derrière la ligne électrique, formant une sorte de Z sur la photo ci-dessous :
Le sous-sol est classiquement composé de granite plus ou moins dégradé avec une faible profondeur de sol et de nombreuses pierres qui rendent le travail mécanique plus compliqué. Ce travail a pourtant été pratiqué dès la reprise des vignes, ce qui a fortement stressé les très vieilles vignes en gobelet qui n'avaient pas connu pareil traitement depuis bien longtemps. Un palissage a également été mis en œuvre pour favoriser le passage des tracteurs et des outils, et la taille a permis de rectifier les gobelets les plus ouverts en supprimant les cornes qui partaient trop de côté, ce qu'on peut voir par exemple sur le cep en bas à droite de la photo ci-dessous :
La vigne a été touchée par la grêle du 12 Avril, les dégâts sont variables selon les endroits, entre 20 et 50%. Ci-dessous une photo de bourgeons secondaires non fructifères qui ont pris le relais des bourgeons arrachés par la grêle :
Outre le travail des sols, comme déjà indiqué, la viticulture est totalement biologique avec uniquement des traitements à base de soufre et de cuivre pour lutter contre les maladies.
Nous prenons ensuite la direction de Fleurie pour voir les vignes acquises dans un deuxième temps : 3,25 ha de vignes sur le climat Roche Guillon (en continuité du coteau de Poncié vers l'ouest), en plein coteau.
Le terroir est plus sableux que sur Besset. La pente est forte, et en ce printemps humide, il faut désherber à la pioche, ce que sont en train de faire les ouvriers du domaine au moment de notre passage (on voit sur la photo la partie où ils sont passés, la vigne apparaît plus claire là où l'herbe a été enlevée. Un travail qui les occupera 2 semaines (à 6)...
Le manque de temps nous oblige à arrêter là. Cette visite m'aura permis de voir que les moyens mis en œuvre par le domaine sont à la hauteur des ambitions et conformes à la philosophie des Graillot. La poursuite des efforts consentis et la réadaptation de la vigne à la culture bio vont certainement amener le domaine à produire de très belles expressions de gamay dans les années à venir, à suivre de près, à commencer par les 2015 qui arriveront cet hiver.