Depuis que je les avais goûtés, il me tardait de vous présenter les vins de Jonathan Pabiot, un domaine de 19 ha qui n'est pas tout neuf (5ème génération) mais dont les efforts qualitatifs récents (depuis la reprise du domaine par Jonathan) ont porté leurs fruits et amener le domaine dans le top 5 de l'appellation, voire mieux... Voici quelques informations pour vous le présenter.
La viticulture :
Toutes les parcelles du Domaine sont cultivées en Agriculture Biologique depuis 2006. Certaines préparations biodynamiques comme la bouse de corne ou la silice de corne sont uilisées. L'ébourgeonnage est très mesuré, on privilégie une vigueur raisonnée grâce aux apports nutritifs (compost issu de fumier bovin durant
l'hiver). Les sols sont labourés ou enherbés, les labours n'étant pas systématiques pour éviter de « déranger » le sol et sa biodiversité. Le couvert végétal est donc souvent conservé tout au long de l'année sauf s'il devient trop encombrant. Il est retourné durant l'hiver (butage), ce qui permet de redonner l'humus au sol.
Jeunes pousses s'élevant au-dessus de la Loire
Les cuvées / vinifications :
Le domaine produit un Pouilly-Sur-Loire à partir d'une petite parcelle de vieilles vignes de chasselas. C'est un vin confidentiel (1000 bouteilles produites) sur lequel je ne m'attarderai pas.
La première et la plus importante cuvée de sauvignon est un Pouilly-Fumé d'assemblage provenant des différents terroirs du domaine (calcaire, argilo-calcaire et marnes, pas de silex sur le domaine). La vendange est triée manuellement, le jus commence sa fermentation alcoolique en cuve inox, à température contrôlée, grâce aux levures indigènes. Cette cuvée est vinifiée très simplement de façon à respecter au maximum la pureté et le fruit. Il n'y a pas de batonnage, pas d'enzymage, juste la recherche d'une grande buvabilité. L'élevage est assez avec des mises étalées entre Avril et Septembre. C'est à mon avis très réussi, je n'avais pas rencontré de fruit si pur depuis bien longtemps sur l'appellation (sauf chez Dagueneau mais sur un autre registre car sur silex).
Il y a ensuite le Pouilly-Fumé Aubaine qui est une sélection de parcelles situées sur un terroir composée majoritairement de marnes blanches Marnes ainsi que de caillotes. Les sols sont très durs à travailler, assez cruels pour les charrues !
Après fermentation, le vin est élevé sur lies pendant 12 mois en cuve enterrée pour éviter les chocs thermiques. Il en résulte un vin riche et suave avec toujours ce fruité intense. La différence avec la cuvée d'assemblage réside surtout sur la densité en bouche et la persistance de la finale. J'aime beaucoup.
Les terrasses de terres blanches : un terroir de prédilection
Le Pouilly-Fumé Prédilection est fait à partir de vignes plantées en terrasses sur un terroir de Marnes kimméridgiennes (terres blanches). Elles sont exposées Sud-Sud Ouest, à flanc de colline surplombant la Loire (voir photo ci-dessus). Cette parcelle bénéficie d'un micro climat favorable avec notamment des nuits fraîches l'été, en raison de la présence de la Loire, à quelques centaines de mètres. Ceci est tès favorable au développement aromatique du Sauvignon. D'où le nom donné par Jonathan Pabiot de -parcelle de- Prédilection. La vinification est réalisée de la même façon qu' Aubaine avec un élevage de 15 mois sur lies fines en cuve béton enterrée.
Enfin, il y a une autre cuvée confidentielle, le Pouilly-Fumé Eurythmie, créé en 2008, réalisé à partir d'un endroit précis sur le même terroir que Prédilection (Marnes kimméridgiennes). Un endroit où la parcelle est plantée sur la roche mère donc très pauvre. Après un léger débourbage, le jus est mit en fût de 227 litres pendant 12 mois puis 6 mois d'élevage en cuve. Aucune action mécanique ou manuelle n'est réalisée sur ce vin. Un léger sulfitage est fait juste avant mise en bouteille. Cette cuvée représente l'aboutissement du travail réalisé par le domaine.
Ce grand domaine (46 ha de sauvignon et 10ha de pinot noir) est plus connu, on le rencontre notamment souvent sur les salons, il réalise un travail parcellaire exceptionnel sur les vins blancs et produit de nombreuses cuvées au caractère bien marqué et bien identifiable grâce aux intelligentes couleurs d'étiquettes (de blanc pour les calcaires purs à gris foncé pour les silex ou encore marron pour les argilo-calcaires). Ca aide à s'y retrouver !
De passage au domaine, j'ai récupéré 2 cuvées qui manquaient à mon offre, Sur le Fort 2013, très accessible et agréable en ce moment, et Les Chasseignes 2013, plus profond mais aussi plus austère à ce stade. Je me suis également arrêté pour voir l'état des vignes et là je vous laisse contempler, c'est vraiment un super travail et ça se voit :
Sur le Fort le 04/06/2015
Mais ma visite au domaine visait principalement à refaire le plein de rouges du domaine, car je ne suis pas le seul à trouver qu'ils sont particulièrement réussis sur les derniers millésimes commercialisés. La cuvée X 2010 prend le relais d'un superbe 2009 qui a été un vrai succès. L'étourneau du même millésime est également de mise, ce sont 2 vins remarquablement fruités et équilibrés qui n'ont aucun défaut, contrairement à de très nombreux pinot de Sancerre, bien souvent rustiques. La cuvée Empreinte 2009 se dévoile également, dans un style plus sophistiquée, puissant et mûr bien sûr (effet millésime). Un rouge haut de gamme et hors du commun, qui devrait se comparer à un Gevrey-Chambertin du même millésime !
Iconoclaste 2013 arrive, c'est toujours un vin de soif limpide, sur le fruit, très facile à apprécier, comme le 2012 dont il ne reste plus guère...
Je vois bien un repas avec un Pouilly-Fumé de Jonathan Pabiot et un Pinot noir du domaine Fouassier. Selon ses envies et son budget, on a de quoi faire ! Et en plus, c'est bio.