Le millésime 2019 en Beaujolais

2018 avait été parfait du point de vue climatique, cela ne pouvait pas durer… Sans que 2019 soit parmi les millésimes les plus difficiles, il fût tout de même semé d’embûches tant le temps fut variable tout au long du cycle végétatif de la vigne, avec du gel pour débuter, du froid pendant la floraison, de la sécheresse en début d’été et des orages conséquents en Août (avec parfois de la grêle). Les rendements sont donc assez faibles mais heureusement la qualité est plutôt bonne.

 

La vigne en 2019

 

Après un hiver sec et doux, la deuxième moitié du mois de Mars est plus que printanière avec un ensoleillement à 100% et des températures qui flirtent avec les 20°C l’après-midi. Il n’en fallait pas davantage pour donner le signal à la vigne qu’il était l’heure de sortir de sa dormance. Evidemment, en débourrant dans les derniers jours de Mars, ce qui est particulièrement tôt, le risque de gel était majeur. Cela ne manqua malheureusement pas et les petites gelées des 5 et 14 Avril eurent des conséquences importantes dans les secteurs précoces tels que les bas de Moulin-à-Vent et autres Beaujolais de bord de Saône.

 

Bourgeon gelé Romanèche 090419

Bourgeon gelé à Romanèches-Thorins (gel du 5 Avril)

 

Si l’étendue des dégâts est relativement faible, ils concernent ceux qui ont déjà été lourdement impactés par les grêles de 2016 et 2017, le sort s’acharne donc pour eux… Ailleurs dans le Beaujolais, il n’y a pas eu de dégâts ou presque mais cette période fraîche d’une quinzaine de jours a calmé les ardeurs de la vigne et retardé le débourrement dans les secteurs tardifs.

Le mois de Mai est globalement sec avec un vent assez fort qui a tendance à casser les jeunes pousses dans les endroits exposés. Le temps est beau et la vigne pousse normalement.

 

Fleurie Grand Pré La Dot Clos de Mez 160519

Le 16 Mai à Fleurie, secteur Grand Pré

 

La floraison commence à une date normale, dans les premiers jours de Juin. Elle s’étale sur une dizaine de jours avec un temps pluvieux (60 mm de pluie entre le 9 et le 15 Juin) qui entraîne de la coulure et du millerandage un peu partout. A peine terminée, c’est un épisode caniculaire qui prend le relai sur la deuxième quinzaine de Juin avec des records de chaleur pour cette période de l’année (plus de 40°C le 24 juin).

Cette chaleur s’accompagne petit à petit de sécheresse car il ne pleut plus pendant 5 semaines, jusqu’à la fin du mois de Juillet. Parfait pour l’état sanitaire de la vigne mais un stress hydrique s’installe juste après nouaison et impacte notablement la croissance des baies.

On arrive donc à la véraison début août une perspective de petite récolte et de vins ultra-concentrés…

 

Véraison D. Bouland 140819

La véraison se termine à la mi-Août sur les secteurs plus tardifs (Hauts de Corcelette à Morgon ici)

 

…Mais le temps change à nouveau brutalement avec l’arrivée d’orages déversant de forts cumuls de pluie (100 mm sur le mois d’Août, on n’avait pas connu cela depuis bien longtemps) et une relative fraîcheur. L’ensoleillement reste bon et la maturation des raisins peut donc se faire tranquillement, sans période très chaude (aucune nuit à plus de 20°C), ce qui permet de conserver les acidités des raisins.

Parmi les orages, certains sont très violents dans la partie sud du Beaujolais et la grêle y fait de très gros dégâts le 18 Août. La zone des crus n’est pas touchée en revanche.

 

Qualité de la vendange 2019

 

Fin Août et début Septembre, alors que les vendanges sont sur le point de débuter, le temps beau et sec s’installe à nouveau, mais sans excès, les nuits étant toujours fraîches et les maximales restant inférieures à 30°C. Cela permet de vendanger à la date voulue dans les meilleures conditions. Selon les secteurs, les vendanges ont lieu entre le 5 et le 30 Septembre.

Pour toutes les raisons évoquées précédemment, les raisins de 2019 naissent d’un cycle particulièrement atypique avec des variations de température et d’humidité aux allures de montagnes russes… Ils sont à la fois petits (millerandage et stress hydrique), peu nombreux (gel et/ou coulure), avec de très bonnes acidités (nuits fraîches après véraison) et de bonnes teneurs en sucres qui garantissent des degrés alcooliques généralement compris entre 12 et 14°.

 

Les vins de 2019

 

On trouve de tout en 2019… il est donc compliqué de généraliser mais je vais essayer quand même.

Les vins présentent des robes relativement claires (peu d’anthocyanes), ils possèdent souvent un fruit pur fait de fruits rouges acidulés et de notes florales apportant parfois un côté évanescent aux vins. Les bouches sont modérément structurés avec des tanins murs et peu marquants. Les acidités sont bonnes et donnent de l’éclat et de la fraîcheur aux vins. Il en ressort des vins très accessibles, charmeurs, frais qui n’auront pas, sauf exception, vocation à être gardés très longtemps mais qui apporteront beaucoup de plaisir dès les premières années.

L’appellation qui s’en tire le mieux est encore Morgon je pense, où les vins ont ce supplément de structure qui manquent à beaucoup de Fleurie et de Moulin-à-Vent cette année. Les autres crus proposent des vins fins, y compris Côte-de-Brouilly dont les deux millésimes précédents sont plus puissants.

En conclusion, je dirai que 2019 est un peu comme 2014 ou 2016 un millésime intermédiaire qui offre beaucoup de plaisir avec son fruit gracieux et sa fraicheur.