Les Impénitents… Tous les amateurs de vin connaissent aujourd’hui cette cuvée de Morgon devenue en quelques années seulement la figure de proue du Beaujolais et de son renouveau. Impénitence et renouvellement, cela a tout d’un paradoxe et pourtant…
Pourtant, ce sont ces deux mots qui définissent le mieux la marche du domaine DESVIGNES. Une marche en avant que rien n’arrête, ni le vieillissement du vignoble, ni les vicissitudes du climat, ni la frénésie autour des vins « nature », pour ne citer que trois particularités du contexte actuel.
Louis-Benoît et Claude-Emmanuelle Desvignes savent faire du bon vin, ils ont hérité cela de l’expérience de 7 générations de vignerons artisans dans une tradition qu’ils perpétuent. Aujourd’hui, ils ont à cœur de relever ensemble d’autres défis avec en particulier la reconstitution du vignoble, la mise en œuvre (le retour devrait-on dire) d’une viticulture écologique et durable et la recherche d’une plus grande précision dans les vinifications.
Reconstitution du vignoble :
Les vignes ont une moyenne d’âge de plus de 70 ans. Bien sûr, cela favorise la qualité mais c’est un sacerdoce que de travailler ces vignes pour en obtenir si peu de raisins. Les années à très faible rendement sont de plus en plus récurrentes (citons 2013 et 2017 avec leurs 18 hl/ha ou encore 2012 et ses 22 hl/ha), et la forme des vieux gobelets interdit souvent la mécanisation du travail du sol, voire même le passage des tracteurs pour traiter.
Les dernières plantations avaient été faites par Louis-Claude Desvignes à Javernières, il y a 20 ans. Il était temps de les reprendre. Cela a été fait cette année avec 2 parcelles pour un total de 70 ares. Notamment celle-ci au lieu-dit Aux Chênes (tout près du domaine Lapierre) :
50 ares plantés le 04/06 au lieu-dit Aux Chênes, Climat Douby (Villié-Morgon au second plan)
Si tout va bien, cette plante connaîtra 4 générations de vignerons !
D’autres plantations vont suivre dans les années à venir, notamment sur la Côte du Py ou le renouvellement est plus que nécessaire. Evidemment, elles ne sont envisageables qu’à raison de quelques dizaines d’ares par an, pour ne pas trop amputer la production.
Conversion à l’agriculture biologique :
S’ils prônent depuis leurs débuts une viticulture la plus respectueuse possible de l’environnement, Benoît et Emmanuelle ont cette fois décidé de franchir le cap de la certification. 2018 sera le premier millésime de la conversion bio. Pour se faire, un investissement dans du matériel performant a été indispensable :
Louis-Benoît ravi de son nouveau pulvérisateur (Lieu-dit Les Plâtres, 07/06/18)
Ce nouveau tracteur permet de pulvériser la bouillie bordelaise sur 6 rangs (des 2 côtés) de manière précise et optimisée. Les 10 ha du domaine pourront désormais être traités en 2 jours seulement, un énorme progrès pour le domaine, surtout dans un printemps chaud et humide comme nous le vivons actuellement.
Du côté du travail des sols, le domaine s’est équipé d’un outil intercep performant pour désherber à la fois dans le rang et sous le rang en un seul passage de manière efficace :
Nouveau tracteur équipé d’un excellent outil de labour intercep
Avec le temps actuel favorable au développement de l’herbe et des maladies cryptogamiques, je pense qu’ils seront vite fixés sur la pertinence de leurs choix de matériel !
Plus de précision dans les vinifications :
Si les vinifications restent et resteront toujours traditionnelles (vinification semi-carbonique en grappes entières), Benoît et Emmanuelle cherchent à être plus précis à chacune des étapes et changent peu à peu le matériel pour respecter au mieux leur belle matière première.
Il y a 2 ans, ils investissaient dans une pompe péristaltique, très favorable à la qualité de par la douceur du transfert (pas de pression de pompage) et l'absence de contact entre les organes mécaniques de pompage et le moût/vin.
Ils ont également introduit des cuves inox dans le chai qui ne comportait jusque-là que des cuves béton et des cuves en fibre de verre (ces dernières étant abandonnées désormais). L’objectif est multiple : mieux contrôler les fermentations, pouvoir varier les techniques d’extraction (délestage, remontage, pigeage), effectuer des vinifications parcellaires quelles que soient les quantités produites et enfin réduire les quantités de SO2.
Les Impénitents sont vinifiés en cuve inox
Les 2016 et 2017 vinifiés en cuve inox sont une grande réussite avec une justesse d’extraction rarement vue ici auparavant et l’élimination d’une grande partie de la réduction qui était un problème récurrent dans les premières années de bouteille ; le domaine va donc petit à petit favoriser ces cuves au détriment des cuves béton.
De nouvelles cuvées :
La multiplication des petites années (en quantité) a d’abord obligé le domaine à mettre en bouteilles plus tôt pour répondre à la demande et aussi, il faut bien le dire, pour ses besoins de trésorerie. Cela l’a également obligé à revoir ses prix de vente, en premier lieu sur les belles cuvées très demandées, pour conserver une entrée de gamme accessible et bien positionnée sur des marchés importants. Cela n’étant pas suffisant, le domaine a pris la décision de créer deux nouvelles cuvées.
La première cuvée est Montpelain ; issue d’une vigne du domaine, elle avait déjà été isolée une fois en 2005 sous le nom de Roche Noire. C’est la meilleure partie du climat Douby et elle se trouve ainsi mieux valorisée que dans la cuvée d’assemblage La Voûte Saint-Vincent dans laquelle elle était intégrée. Plus structurée, plus austère également, cette cuvée est bien typique de Morgon et demandera 2 à 3 ans de garde pour commencer à se livrer (alors que La Voûte Saint-Vincent pourra être appréciée dès cet été).
La seconde est une cuvée de négoce produite sur Corcelette. Après s’être longtemps questionné sur la pertinence d’acheter des raisins alors qu’ils défendent depuis toujours une démarche artisanale, ils ont fini par se lancer, un peu par nécessité il faut bien le dire. Mais tant qu’à faire quelque chose, autant le faire bien. Ils ont choisi d’acheter les raisins à leur cousin qui travaille ses vignes dans le même esprit qu’eux (tout en restant en conventionnel en revanche), et sur un terroir différent ayant une maturité bien plus tardive (vignes situées à Vermont à 450 m d’altitude environ). Ce qui leur a permis de vendanger les raisins dans de bonnes conditions après avoir terminé les vendanges sur le domaine.
Logiquement, le vin qu’ils en ont tiré est bien caractéristique de Corcelette, avec une minéralité affirmée (impression de sucer un caillou) et des notes de petits fruits rouges acidulés (fraise, groseille). Moins structuré que les Morgon du domaine (sauf peut-être La Voûte Saint-Vincent) mais tout en élégance et en croquant, il sera parfait en toutes occasions dans les 3 à 5 ans à venir.
Ces deux nouveaux vins sont habillés d’une étiquette beaucoup plus moderne que la traditionnelle voûte du domaine arborée par les vins historiques de la propriété.
Etiquettes des 2 nouvelles cuvées (Corcelette à gauche et Montpelain à droite)
Le domaine propose donc 6 cuvées en 2017 alors qu’il n’en proposait que 3 jusqu’en 2008, puis 4 à partir de 2009 et la naissance de la cuvée Les Impénitents.